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Comment choisir une bonne viande de bœuf?

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admin
août 20, 2015
Le T-bone est une découpe de boeuf américaine comprenant le filet et le faux-filet, ainsi qu'un morceau d'os de la colonne.

Le T-bone est une découpe de boeuf américaine comprenant le filet et le faux-filet, ainsi qu’un morceau d’os de la colonne.

Getty Images/iStockphoto

Une bidoche sans reproche n’est pas qu’une affaire de morceau ni de tendreté, comme le laisse à penser le nouveau système d’étiquetage mis en place dans les supermarchés. La race, l’élevage, le mode de découpe ou encore la maturation ont également un impact sur sa qualité.

Jusqu’à récemment, on pouvait encore trouver une bavette, un plat de côtes, une gîte à la noix ou une macreuse au supermarché. Mais ça c’était avant… Avant l’arrêté gouvernemental mis en place en décembre dernier pour faciliter le choix des consommateurs au rayon des viandes préemballées de leur grande surface habituelle. Plus besoin de connaître l’anatomie bovine dorénavant pour choisir son morceau, puisque les dénominations des muscles, jugées trop obscures, ont été remplacées par des termes génériques, soit “steak”, “rôti”, “pot-au-feu”…, avec un mini-mode d’emploi destiné aux cuisiniers débutants (“à bouillir”, “à braiser” ou “à griller”). Ce système s’accompagne de notes à étoiles -comme dans l’hôtellerie-, de une à trois, indiquant le degré de tendreté de la viande.

Cette mesure a le don de faire sortir les crocs à Christian Le Lann, président de la Confédération française de la boucherie charcuterie traiteur: “Comme dit Camus, ‘mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde’. Or, cette mesure abêtit les Français.” À en juger par ce nouvel étiquetage, duquel est exclue toute indication sur la race de la bête ou son mode d’élevage, la tendreté d’une viande en serait donc son seul et unique caractère. Qu’en est-il de son goût, de sa maturation ou de sa découpe? Ces éléments déterminent la qualité d’une pièce de viande, au moins autant que sa tendreté… “Les étoiles ne sont pas une garantie de goût, juste une classification sur les morceaux qui rajoute de l’opacité aux consommateurs” fustige encore Christian Le Lann. Idem pour les catégories (1re , 2e et 3e catégories), qui n’indiquent en rien une qualité supérieure ou moins bonne. Liées à l’emplacement des morceaux, celles-ci désignent simplement leur teneur en matières grasses, sachant qu’une pièce plus riche ne sera pas moins bonne, elle nécessitera seulement une cuisson plus adaptée afin de lui assurer la tendreté souhaitée.

La boucherie française, une exception culturelle

Les artisans-bouchers s’accordent sur un point: travailler sur pied est un gage de qualité. “Acheter des bêtes directement chez les éleveurs permet de voir la qualité de l’animal” explique Hugo Desnoyer, boucher parisien qui fournit l’Élysée et de nombreux restaurateurs étoilés. Depuis des siècles, tout un savoir-faire a été développé en étroite entente entre les maîtres-bouchers et les cuisiniers pour que l’animal soit utilement découpé et cuisiné. Cet “art de la découpe française”, réputé comme étant l’un des meilleurs du monde, tient au fait que la totalité de la bête est découpée de la tête aux pieds, sans rien jeter. “La découpe est basée sur des habitudes culinaires, c’est une particularité française d’aller chercher la poire, le merlan ou l’araignée” explique encore Christian Le Lann. “Chaque pièce a une destination culinaire bien précise, ajoute de son côté, Hugo Desnoyer. Avec la poire on peut faire des pavés ou des rôtis exceptionnels mais pas un pot-au-feu…”

Il n’y a pas que dans le cochon que tout est bon. Dans le boeuf aussi, et pas seulement l’entrecôte ou le filet. Soyons raisonnables, nous ne pouvons pas dévorer que les morceaux dits “hauts” et laisser les “bas” être transformés en steak haché. Le merlan, la surprise ou le rond de tranche sont autant de pièces goûteuses à découvrir. Plus que la pièce, disons que ce sont davantage les qualités intrinsèques de l’animal qui comptent… Et un morceau moins tendre issu d’une bonne bête peut se révéler bien plus goûteux qu’un filet issu d’une vieille carne.

Affinage et animaux de qualité

Autre étape essentielle dans l’élaboration de la viande: son affinage! Ce processus naturel se déroule en chambre froide sur des parties entières de l’animal. Il est nécessaire pour transformer le muscle en une chair tendre et goûteuse. La viande est “rassie”, pendant une période allant d’une dizaine de jours jusqu’à huit semaines, ce qui donne une viande nettement plus tendre, juteuse et aux arômes incomparables. En somme, plus une viande est “vieillie”, plus elle se bonifie. Mais comme un grand bordeaux, son prix flambe! “Le savoir-faire du boucher va apporter un plus pour certains morceaux mais attention au phénomène de mode, met en garde Christian Le Lann. Il faut au départ que la qualité de viande puisse supporter cet affinage et qu’il soit fait de façon maîtrisée et dans des conditions d’hygiène indispensable, au risque de donner un mauvais goût…”

Si la part de travail des bouchers est très importante dans le goût de la viande, les conditions de vie de l’animal le sont aussi. “Une bonne viande, ce sont d’abord des animaux de qualité élevés lentement, mis en pâture à l’herbe plutôt que nourris au soja ou au maïs OGM”, prévient Pierre Bouchez, éleveur installé dans le Pas-de-Calais qui vend la quasi-totalité de sa viande en direct sur quelques marchés ou par le biais de La Ruche qui dit Oui. Effectivement, difficile de produire une bonne viande avec une bête qui a grandi en batterie. L’élevage traditionnel est le mode privilégié pour faire une viande goûteuse: les animaux doivent être adaptés à leur environnement, grandir dans le bien-être, à leur rythme et nourris avec une alimentation saine et équilibrée. “La vache est herbivore et doit manger de l’herbe, c’est elle qui donne le goût de la viande” insiste Hugo Desnoyer. C’est ce qui leur permet de développer de façon naturelle du bon gras en juste quantité, contrairement aux animaux nourris aux céréales.

Gare à l’appellation boeuf

L’abattage aussi a son importance: “Il faut éviter le stress de leur dernier voyage, poursuit Hugo Desnoyer. C’est un moment décisif. Si la bête est stressée, ses chairs se raidissent et deviennent acides. Le phénomène est irréversible, il gâtera le goût et la tendreté de la viande.” Aubrac, Salers, Charolaise, Limousine, Normande… Ces noms font saliver les carnassiers, mais donnent-ils automatiquement une bonne viande? “Il vaut mieux privilégier les races à viande françaises”, pense Christian Le Lann. Mais pour Pierre Bouchez, ce n’est pas le remède à tous les maux: “les moyens de production contribuent autant que la race au goût! Une Limousine qui aura été élevée en 18 mois en industriel (contre 48 chez nous), ça n’apportera rien de plus au caractère gustatif!”

Attention toutefois à ce qui se cache sous l’appellation de boeuf car en France, la réalité n’est pas si bucolique: ce sont souvent des “vaches réformées”, c’est-à-dire des bêtes “en fin de course” issues de races laitières, engraissées quelques semaines avant d’être abattues. Elles sont bien moins chères que les races à viande mais aussi bien moins goûteuses. Une bonne viande n’est donc pas qu’une viande “3 étoiles” selon le nouveau système de notation des supermarchés. C’est aussi et surtout une viande “éthique”, qui a grandi dans la nature et à son rythme, et qui aura été cuisinée selon une recette appropriée, pour nous faire mugir de plaisir.

À CHACUN SON LABEL

  • Il n’y a que le Label Rouge qui prend en compte les qualités gustatives grâce à des tests organoleptiques réalisés sur les produits.
  • Le label Bleu-Blanc-Coeur garantit, lui, que les animaux ont reçu une alimentation riche en oméga-3 (graines de lin, luzerne, herbe) qui apporte une valeur nutritive supérieure.
  • “AB” signifie que l’élevage suit les principes de l’agriculture biologique (bien-être animal, respect de l’environnement, alimentation sans OGM…).
  • Quant à la mention “élevé en plein air”, elle n’assure pas un élevage dehors, mais indique seulement qu’en journée -3 heures par jour-, les animaux doivent avoir accès à un parcours extérieur en majeure partie recouvert de végétation…
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